La dixième chambre de la Cour de justice de l’Union européenne a rendu un arrêt particulièrement pertinent sur l’étendue de la protection des  marques vis-à-vis des particuliers suite à une demande de décision préjudicielle*. (30 avril 2020)

En l’espèce il était question de savoir si un particulier (finlandais) qui avait reçu, en provenance de Chine, un lot de produits contrefaits (roulements à billes) pouvait les envoyer en Russie en servant “d’intermédiaire”.

Pour rappel, l’article 5 de la directive 2008/95, intitulé « Droits conférés par la marque », dispose :

« 1.      La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires (…)

Cet article pose en conséquence comme condition pour bénéficier de la protection que la marque soit utilisée dans “la vie des affaires”.

En l’espèce, et sans revenir sur l’ensemble des décisions nationales prises dans ce dossier, la question litigieuse était donc de savoir si cette activité “d’intermédiaire” pouvait être considérée comme remplissant la condition d’un”usage dans la vie des affaires”.

En pratique, l'”intermédiaire” n’avait reçu pour ses services qu’une cartouche de cigarettes et une bouteille de cognac.

La Cour suprême nationale fait valoir qu’il ne ressort pas clairement de la jurisprudence de la Cour (européenne) si le montant de l’avantage économique (la rémunération/contrepartie) qu’obtient une personne privée en raison de la prétendue contrefaçon d’une marque constitue un élément pertinent pour déterminer l’existence ou non de l’usage d’une marque dans la vie des affaires.

La Cour européenne a décidé qu’une telle pratique relevait de la vie des affaires et en conséquence est interdite conformément aux dispositions de l’article 5 de la directive 2008/95, intitulé « Droits conférés par la marque ». Pour cela, elle a notamment relevé le fait qu’il s’agissait d’une importation et que ces produits n’étaient pas destinés à un usage privé.

(…) doit être interprété en ce sens qu’une personne n’exerçant pas une activité commerciale à titre professionnel qui réceptionne, met en libre pratique dans un État membre et conserve des produits manifestement non destinés à l’usage privé, qui ont été expédiés à son adresse depuis un pays tiers et sur lesquels une marque, sans le consentement du titulaire, est apposée doit être regardée comme faisant usage de la marque dans la vie des affaires, au sens de la première de ces dispositions.”


Pour consulter l’arrêt cliquez ICI

*procédure du droit de l’Union européenne par laquelle les juridictions des États membres interrogent la Cour de justice de l’Union européenne sur l’interprétation des traités européens ou sur l’interprétation ou la validité d’un acte du droit dérivé de l’Union avant de trancher un litige dans lequel cet acte est invoqué. Son objectif est « de garantir la sécurité juridique par une application uniforme du droit communautaire dans l’ensemble de l’Union européenne »

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