Le 28 février 2024, la Cour de cassation a rendu un arrêt important en matière de cession de droits sur une marque et de garantie d’éviction. En l’espèce, M. [W] [X] avait cédé ses droits sur les marques “[W] [X]” à la société Pmjc. Un litige est ensuite survenu entre les parties, M. [W] [X] assignant la société Pmjc en contrefaçon et concurrence déloyale. La société Pmjc a été condamnée pour contrefaçon des droits d’auteur de M. [W] [X]. Ce dernier a ensuite assigné la société Pmjc en déchéance des marques pour déceptivité. La cour d’appel de Paris a prononcé la déchéance des marques, ce qui a conduit la société Pmjc à se pourvoir en cassation.

Deux questions se posaient à la Cour de cassation:

  • la première est de savoir si le Cédant pouvait agir en déchéance envers le cessionnaire, la Cour s’est prononcée sur cette question
  • la seconde est de savoir si le fait de faire croire au consommateur que le créateur participe toujours à la création des produits portant sur une marque est une manoeuvre pouvant être jugée dolosive ou s’il s’agit d’une tromperie. Sur ce point, la Cour de cassation précise qu’il s’agit d’une question d’interprétation de directives européennes (articles 12, paragraphe 2, sous b), de la directive 2008/95/CE et 20, sous b), de la directive (UE) 2015/2436) et renvoie cette question à la Cour de justice de l’Union

II. Sur l’action en déchéance du cédant

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de la société Pmjc sur le premier moyen, à savoir s’il était possible pour le cédant de demander la déchéance de la marque cédée à son cessionnaire. Elle a rappelé que le cédant de droits sur une marque est tenu à la garantie d’éviction (article 1628 du Code civil) et ne peut, en principe, agir en déchéance pour déceptivité acquise de cette marque. Cependant, la Cour de cassation a également souligné qu’il existe une exception à cette règle lorsque l’action en déchéance est fondée sur la survenance de faits fautifs postérieurs à la cession et imputables au cessionnaire.

III. Portée de l’arrêt

D’une part, cet arrêt apporte une précision importante sur la règle de la garantie d’éviction en matière de marques. En effet, il confirme que le cédant peut agir en déchéance pour déceptivité acquise de la marque lorsque l’action est fondée sur des faits fautifs postérieurs à la cession et imputables au cessionnaire. D’autre part, cet arrêt est susceptible d’avoir des implications importantes pour les cessions de marques et les litiges ultérieurs entre les parties. En effet, il incite les cessionnaires à faire preuve de prudence dans l’utilisation des marques qu’ils ont acquises, car ils peuvent désormais être exposés à un risque de déchéance en cas de agissements fautifs.

Remarques:

  • Cet arrêt ne tranche que  la question de la recevabilité de l’action en déchéance.
  • La question de savoir si les agissements de la société Pmjc constituent effectivement une tromperie du public n’a pas encore été tranchée.
  • Cette affaire sera donc renvoyée devant une autre cour d’appel pour être jugée sur le fond suite à la décision de la Cour de justice de l’Union européenne.

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